La
nuit
du
cirque

L'événément

© Sébastien Armengol

Créée en 2019, La Nuit du Cirque est une grande manifestation qui célèbre le cirque, sous toutes ses facettes et dans tous les territoires, en France et à l’étranger.

C'est un moment suspendu au cœur de l’automne, fédérateur et festif, pour partager tous ensemble la vitalité et la diversité de cet art résolument populaire et exigeant en mettant en valeur l'engagement du cirque dans les combats sociétaux et environnementaux, ainsi que sa dimension interculturelle et intergénérationnelle.

La Nuit du Cirque est une photographie de la diversité de la création circassienne à l’instant T qui raconte, au fil des éditions, l’histoire d’un art en mutation permanente, parfaitement perméable aux grandes questions qui font des débats de société.

Événement international initié et organisé par Territoires de Cirque avec le soutien du ministère de la Culture en France, en collaboration avec l’Institut Français et avec l’appui de Circostrada, circusnext, ProCirque (Suisse), BUZZ (Allemagne), la FFEC - Fédération Française des Écoles de Cirque, la FEDEC - Fédération Européenne des Écoles de Cirque professionnelles et le réseau Grand CIEL.

La Nuit du Cirque, par Rima Abdul Malak

Créée en 2019, La Nuit du Cirque est devenue un rendez-vous incontournable qui met en relief la vitalité et la diversité du cirque de création auprès de publics toujours plus larges.

Cette manifestation s’inscrit dans une politique volontariste du ministère de la Culture de soutien à la création circassienne dans tout le pays à travers un vaste réseau de Pôles Nationaux Cirque (PNC) qui ne cesse de s’agrandir, à l’image de la Cité du cirque Le Plongeoir au Mans, labellisée en juin dernier.

Comme un instant suspendu au cœur de l’automne, La Nuit du Cirque propose pendant 72 heures, sur tout le territoire, dans les villes comme dans les campagnes, plus de 250 rendez-vous – spectacles, ateliers, conférences, projections, qui mettent toute la pluralité des arts du cirque en lumière. Je pense par exemple au très joyeux spectacle 3D de Jonathan Guichard et sa compagnie H.M.G. qui nous invite à réfléchir à la manière dont nous occupons l’espace, ou encore au Complexe de l’Autruche de la compagnie Courcirkoui qui met en scène un collectif d’équilibristes de haut vol.

Je tiens aussi à saluer l’engagement solidaire de cette 5ème édition. Pour la première fois en effet, Territoires de Cirque coproduit le spectacle de la compagnie ukrainienne Inshi intitulé Rêves dont la première représentation sera donnée à Nantes au Théâtre Graslin. Au-delà du geste d’amitié adressé au peuple ukrainien, ce spectacle nous rappelle l’importance de créer, de jouer, de résister à la guerre par l’art.

Je me réjouis par ailleurs de l’internationalisation croissante de ce rendez-vous annuel, preuve de toute l’attractivité du cirque de création au-delà de nos frontières. C’est un signal fort pour encourager la mobilité des artistes et des œuvres.

En cette année placée sous l’esprit olympique, cette Nuit du Cirque vient nous rappeler la force du collectif, la possibilité du dépassement de soi, la nécessité de s’inspirer mutuellement pour penser l’avenir.

Bravo à tous les partenaires et participants de cette nouvelle édition ! En piste !

Rima Abdul Malak
Ministre de la Culture

Le mot de Territoires de cirque

Entretien avec Philippe Le Gal
Ancien Président de Territoires de Cirque
Directeur du Carré Magique, Pôle National Cirque en Bretagne


À l’occasion de cette 5ème Nuit du Cirque, Territoires de Cirque (TDC) coproduit pour la première fois un spectacle, Rêves de la compagnie ukrainienne Inshi, qui sera créé à Nantes au Théâtre Graslin. En plus de l’évident geste de fraternité que cela constitue, faut-il y voir de la part du réseau le désir de donner à cette édition une identité particulière ?

La Nuit du Cirque rassemble chaque année davantage de lieux très différents les uns des autres : des collectivités territoriales, des théâtres municipaux et d’autres lieux de diffusion généralistes ou encore, bien évidemment, les structures dédiées au cirque de création que sont les Pôles Nationaux Cirque (PNC). Chacun a sa définition du cirque. Chaque structure poursuit aussi ses objectifs en propre en participant à la Nuit du Cirque. Cet événement, qui pour la 4ème année consécutive, s’étend sur trois jours, constitue ainsi d’édition en édition un panorama plus précis de la création circassienne dont nous pouvons d’emblée souligner l’extrême diversité des esthétiques en jeu. Cette variété des formes et des formats conduit de fait Territoires de Cirque à s’interroger sur son rôle.
L’association doit-elle s’engager pour mettre en valeur de nouvelles tendances, valoriser des esthétiques spécifiques ? Et si oui, lesquelles ? Avec ce projet ukrainien, un début de réponse est formulé : si l’approche artistique demeure à juste titre l’apanage de chaque participant à La Nuit du Cirque, Territoires de Cirque entend ici souligner que la création, le geste artistique, revêtent un caractère inaliénable, ils sont constitutifs de nos existences et en ce sens rappellent que derrière la nécessité vitale pour les artistes de créer, c’est un appel à exister coûte que coûte et par extension, à résister. Avec le drame ukrainien qui nous concerne au premier chef par sa proximité, les questions qu’il soulève, nous touchons à une forme de paroxysme. Nous sommes dans une configuration où l’urgence de réagir commande.


L’urgence dont vous parlez est-elle compatible avec une exigence artistique ?

Oui, elle ne se soustrait en aucune manière à cet enjeu et ce n’est pas une question de priorité, c’est constitutif de l’acte de création. C’est le cas avec la compagnie Inshi qui a été créée en Ukraine au moment de la crise sanitaire par Roman Khafizov, l’un des acteurs majeurs du cirque à Kiev, très actif en matière de formation des jeunes talents et bon connaisseur aussi de notre paysage circassien pour avoir été interprète dans plusieurs productions de compagnies françaises. Rêves, qui sera créé pour la Nuit du Cirque 2023, sera le troisième spectacle d’Inshi, qui a donc déjà une identité forte, marquée par l’école ukrainienne qui est reconnue et très différente de l’école française, de même que l’ensemble des écoles de l’Est européen. Il existe là-bas une exigence technique considérable, qui s’exprime essentiellement sous forme de cabarets, où les artistes présentent le numéro qu’ils travaillent pendant une grande partie de leur carrière. Le travail en compagnie au sens où on l’entend ici est donc rare en Ukraine, ce qui fait l’un des intérêts d’Inshi, qui va aussi nous faire découvrir un cirque que nous connaissons peu.


Cet engagement en production a-t-il vocation à s’inscrire sur la durée, à venir par exemple éclairer de futures Nuits ?

Tout à fait, car depuis cette année, Territoires de Cirque bénéficie grâce au concours du ministère de la Culture, via la Direction Générale de la Création Artistique, d’un fonds de production. Il va permettre à tous les membres du réseau de se rassembler pour explorer la question formulée plus tôt : celle des voies circassiennes à encourager parmi toutes celles qui existent. Il me semble, entre autres choses, fondamental d’accompagner les grandes formes, les grandes aventures circassiennes qui ont beaucoup souffert de la crise sanitaire. Aujourd’hui, alors que les compagnies qui ont fortement marqué de leur empreinte le cirque contemporain ont disparu, tels le Cirque Plume ou Les Arts Sauts, il est important de continuer d’avoir des phares capables comme vous le dites « d’éclairer la Nuit », mais aussi l’ensemble de notre belle constellation. Nous pourrons d’ailleurs découvrir durant cette édition 2023 plusieurs créations qui témoignent de cette ambition, malgré parfois des fragilités qui sont liées au contexte, notamment économique. Je pense à DERBY de Valia Beauvieux, qui à ma connaissance est le premier spectacle à s’intéresser à l’univers du roller derby, sport exclusivement féminin. Une étape de travail est programmée à La Brèche – Pôle National Cirque à Cherbourg, où la création verra le jour en mars 2024 dans le cadre de la prochaine édition du festival SPRING. Hors Nuit du Cirque, on peut encore citer Salto d’Edward Aleman ou Barrières de Wilmer Marquez, de grands formats acrobatiques pour les scènes de théâtres. Mais au-delà de la question des formats, il y a aussi des pistes que nous souhaitons explorer comme les écritures dédiées au jeune public ou encore à l’espace public, écritures spécifiques en développement qui méritent que l’on s’y arrête, car leurs économies sont immédiatement plus fragiles, ce qui ne devrait pas être et ce que ce fonds de production tentera a minima de corriger.


Il est important de dire que ce désir d’affirmation d’une identité propre à TDC et à la Nuit du Cirque, à travers des choix artistiques spécifiques, ne va pas à l’encontre de la grande diversité esthétique qui fait depuis sa création la beauté et l’intérêt de l’événement.

Chaque établissement reste en effet totalement libre de sa programmation lors de la Nuit du Cirque. C’est un principe auquel nous tenons fortement à Territoires de Cirque, qui à l’origine a créé ce rendez-vous dans le but de remettre en lumière la création circassienne dans son ensemble et dans toute sa diversité et complexité, tant cet art apparaît de plus en plus comme un art transversal, ouvert au partage sans aucune velléité hégémonique. La Nuit du Cirque s’inscrit comme le rebond post 2001-2002, saison intitulée l’Année des Arts du Cirque, qui a initié une remarquable montée en gamme de la présence du cirque au sein du réseau généraliste de diffusion du spectacle vivant, notamment dans les Scènes Nationales. En 2010, il y a ensuite eu la labellisation avec la création des Pôles nationaux des arts du cirque qui deviendront très vite les Pôles nationaux cirque, une simplification qui vient appuyer « l’universalité » de cet art majeur, il va sans dire ! Pensée sur les modèles de la Nuit des Musées et de la Nuit Blanche, la Nuit du Cirque s’inscrit dans la continuité de cette histoire de la discipline ponctuée de temps forts tous destinés à faire avancer sa reconnaissance par l’institution et le public. À l’origine, La Nuit devait aussi réconcilier deux grandes voies qui caractérisaient alors le cirque : celle de la radicalité, ou de l’exploration, essentiellement prises en charge par les Pôles nationaux cirque, et celle du divertissement, du mainstream comme on dit. Inviter dans le cadre d’une même Nuit chaque structure à déployer une programmation conforme à sa vision du cirque est pour nous une manière de replacer toutes les formes de cirque sur un même niveau. Ce qui est d’autant plus naturel que certains artistes passent aisément d’un spectre du cirque à l’autre, tels Jonathan Guichard et sa Cie H.M.G, dont on pourra voir en Bretagne le très joyeux et accessible 3D et en Île-de-France 080, qui relève d’une recherche formelle. En résumé, la surprise, avec les circassiens, est permanente.


Cette idée d’horizontalité au coeur de la Nuit du Cirque s’exprime aussi par la participation d’écoles de cirque. En quoi leur présence est-elle importante pour TDC ?

Qu’elles soient professionnelles ou amateures, les écoles permettent d’entretenir un rapport fort à un territoire. Grâce à différentes présentations publiques, le public peut suivre les élèves jusqu’à la fin de leur formation, ce qui crée un lien unique. Dès qu’elle a été étendue, d’une à trois journées, en 2020 – et c’est d’ailleurs en partie pour permettre la participation des écoles qu’a été décidé ce changement de format –, La Nuit du Cirque a fait partie pour de nombreuses écoles de ces nécessaires rencontres avec le public. Citons ainsi l’école de La Grainerie à Toulouse et celle de Châtellerault. Parmi les écoles amateures, nous avons par exemple Les Cas du Cyrque, qui sillonne la campagne lotoise et crée du lien avec la vie professionnelle. Les écoles sont un lieu de grande inventivité où peuvent naître des manières très singulières de vivre La Nuit du Cirque.


On remarque cette année plus que les précédentes que pour traverser cette Nuit d’une façon originale, plusieurs lieux ont “éditorialisé” le rendez-vous. Comment interprétez-vous cette pratique ?

Sans doute à la fois comme un signe de bonne santé et de maturité. En cinq ans, les lieux participants à la Nuit du Cirque ont pu affiner leur compréhension des enjeux que pouvaient avoir ces trois jours sur leur saison ou plus largement leur activité. Ils ont donc aussi précisé leur programmation, parfois en l’éditorialisant, ce qui me semble être une voie à creuser pour les Pôles nationaux cirque. Comment, en effet, créer l’événement à partir de notre quotidien ? Le Plongeoir – Cité du Cirque au Mans et dernier né de la famille des Pôles nationaux – sa labellisation ayant été officialisée en ce mois de juin 2023, un peu plus de six mois après avoir bouclé le projet et rempli toutes les conditions, comme quoi, il faut savoir être patient… – a ainsi tôt fait le choix de faire de La Nuit du Cirque un temps particulier dans sa saison, en imaginant des formats inhabituels de rencontre avec le public. Ce fut une première fois un tour de la ville en car, qui menait le spectateur de lieu en lieu, de spectacle en spectacle. Cette année, Richard Fournier et son équipe confient à Johan Swartvagher l’organisation d’une Nuit jonglée où la Muchmuche compagnie, Scratch, Monad ou encore Éric Longequel et Neta Oren présenteront la richesse de leur discipline. Onyx, le Théâtre de Saint-Herblain, prend la consigne au pied de la lettre et organise une Nuit complète, de 19h à 7h du matin, 100% féminine, avec spectacles et repas. La Nuit bouscule les habitudes de diffusion. C’est une nécessité pour les arts du cirque aujourd’hui, qui comme de nombreux autres secteurs de la création se trouvent dans une situation délicate avec des créations qui n’ont pu rencontrer leur public au moment de la crise sanitaire de ces deux dernières années et d’autres qui voient tout juste le jour. D’où mon choix par exemple au Carré Magique de consacrer cette Nuit à des propositions dont l’existence a été chahutée, comme K par K de la jeune compagnie Sacorde ou Le Complexe de l’Autruche de la compagnie du Courcirkui. Ce collectif d’équilibristes a conçu un projet exclusivement centré autour de cette discipline artistique avec neuf interprètes. Le temps de création ayant été très long, l’investissement humain conséquent, il serait dramatique que cette pièce de cirque ne puisse tourner et trouver ainsi son public. Pour autant, peut-on parler dans cet exemple d’éditorialisation, je n’en suis pas certain. Une zone de flou demeure mais elle est largement compensée par la dynamique de la multiplicité des approches en matière de créativité chez ces artistes qui nous permettront de fédérer des publics très différents. L’un des grands enjeux de La Nuit du Cirque également.


D’autres lieux privilégient des créations en cours, ou des formes légères qui parfois sont créées pour l’occasion.

Les lieux qui accueillent de nombreuses résidences, comme La Cascade à Alba-la-Romaine, Les Subs à Lyon, le Palc à Châlons-en-Champagne ou la Grainerie à Balma, font en effet de La Nuit le temps du galop d’essai pour les artistes présents sur place. Autre tendance de cette édition, qui pourrait s’inscrire dans la durée : le cabaret. Yann Frisch en crée un à l’Esplanade des Terres Neuves à Bègles, le Cirque Baraka à La Grainerie, le Cirque du Docteur Paradi au Cirque Jules Verne à Amiens, le collectif Les Malunés à l’Agora de Boulazac… Ces formes témoignent elles aussi d’une urgence à créer, d’un désir de spontanéité. Elles permettent à des artistes engagés sur des temps longs de production de creuser sur une durée plus réduite une de leurs pratiques ou d’en développer de nouvelles. En Allemagne, qui participe à La Nuit, ce type de geste circassien est majoritaire. Nous avons beaucoup à gagner à regarder comment le cirque se vit ailleurs, et la Nuit du Cirque nous y invite en quelque sorte.


À l’international, observe-t-on la même diversité d’approches de La Nuit qu’en France ?

Chaque pays entre dans La Nuit avec son cirque, qui peut être proche de celui que l’on connaît en France, c’est le cas de la Belgique, ou beaucoup plus éloigné. La Suisse, qui participe depuis l’origine à La Nuit du Cirque, mobilise tous les acteurs de la filière sous la forme d’un véritable festival, reflétant la logique événementielle très ancrée dans ce pays. Au Burkina Faso, qui nous rejoint cette année, le cirque sera très social, comme celui qui s’y pratique au quotidien. La Pologne, les Caraïbes, le Canada exprimeront aussi leur personnalité circassienne, dans une optique d’échange, de coopération, contribuant ainsi de belle manière à l’intensité de La Nuit du Cirque, rendez-vous qui s’affranchit naturellement de toute frontière.

Propos recueillis par Anaïs Heluin

L’équipe de la nuit du cirque

Secrétaire générale de Territoires de Cirque,
direction éditoriale et coordination de la Nuit du Cirque

Delphine Poueymidanet

Assistée par
Tania Reyes

Design graphique
Pierre Tandille et Magali Brueder, Aéro Club

Site internet (design + code)
Salomé Macquet

Communication web
Annelise Guitet

Relation presse nationale
Carine Mangou

En collaboration avec
Guillaume Alberny

Traductions anglaises
Jeremy Mercer

Journaliste
Anaïs Héluin

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